Réduire l’écart et surmonter les différences entre les lieux de travail :
Autres stratégies de réussite
par Ami Wright, rédactrice technique
- - - Traduction par Laurence Lollier ( v.o. ) - - -
Selon le Consulat Général de France à Boston, plus de 180 entreprises françaises sont actuellement implantées en Nouvelle-Angleterre. Chaque année, de nouvelles sociétés françaises s’installent dans la région. Pour la plupart, les États-Unis représentent un marché de grande envergure. C’est pourquoi leur degré de réussite outre-Atlantique est déterminant quant à leurs résultats globaux. Mais au-delà des revenus, l’implantation aux États-Unis peut également affecter les modes de fonctionnement de l’entreprise.
Stratégie de niche
La France et les États-Unis sont tout simplement des marchés d’échelles différentes. La France est un marché relativement petit où la stratégie commerciale consiste le plus souvent à offrir une large gamme de produits et services. Choisir de se limiter à un créneau commercial unique est considéré comme l’attitude d’une petite entreprise qui a peur de se développer.
En revanche, aux États-Unis, la stratégie de niche est cruciale. Le marché américain est immense comparé à celui de la France. Y utiliser la même stratégie qu’en France reviendrait à disperser ses efforts, ce qui affaiblirait la position de l’entreprise sur le marché au lieu de la renforcer.
Aux États-Unis, il est fréquemment recommandé aux start-up de se concentrer sur un créneau afin qu’elles puissent mieux le dominer. En effet, du fait de la taille du marché américain, il est possible de générer de larges revenus tout en se limitant à une niche commerciale. De même, pour les entreprises européennes qui souhaitent s’implanter sur le marché américain : dédier toutes ses ressources à un seul créneau afin de le maîtriser est une stratégie clé.
Dans certains cas, cela signifie que la même société adoptera deux approches différentes : la diversification en Europe et une stratégie de niche aux États-Unis. Mais, dans d’autres cas, c’est la stratégie de niche qui est privilégiée par toute l’entreprise. Par exemple, lorsque la société IDDI (International Drug Development Institute) a été créée en Europe, elle offrait une large gamme de services aux entreprises pharmaceutiques et de biotechnologies. Maintenant, après s’être concentrée sur le marché américain, l’entreprise a grandi mais a également redéfini son offre pour un secteur plus restreint. Actuellement, IDDI offre les mêmes services de conception de tests cliniques et d’analyse de données à ses clients aux États-Unis, en Europe et en Asie. Selon le directeur général, Marc Buyse, cela a facilité le processus de vente, même en Europe où une stratégie de diversification est plus courante.
Simplification du produit
Tout en définissant leur niche et en développant la stratégie de marketing appropriée, les entreprises peuvent réaliser qu’un produit qui se vend facilement en France est trop compliqué pour le marché américain. Selon Chris Hote, directeur général de Digimind Inc., le goût des créations complexes est peut-être un fait culturel français. En revanche, le degré de complexité d’une technologie n’a aucun intérêt pour les Américains. En effet, leur perspective est plutôt axée sur les atouts d’un produit, ce qu’il peut rapporter et avec quels bénéfices.
Par conséquent, pour qu’un produit ou un service soit viable aux États-Unis, il faut souvent le simplifier. Dans de nombreux cas, il suffit d’en changer la présentation. Par exemple, certaines fonctions seront omises ou présentées d’une manière simplifiée. Mais dans d’autres cas, c’est la conception même d’une partie du produit qui doit être revue.
Ajustement du processus commercial
Le processus commercial est généralement différent en France et aux États-Unis. En France, il se déroule le plus souvent en personne car c’est la relation personnelle avec le client qui est privilégiée, à un tel point qu’elle peut compter davantage que les produits. Il est possible que le processus de vente prenne assez longtemps et nécessite de nombreuses réunions.
En revanche, aux États-Unis, les relations personnelles sont moins déterminantes. En effet, il est possible de signer des contrats sans jamais rencontrer votre contrepartie, pourvu que votre produit ou service résolve un problème du client. Les entreprises choisissent leur niche ainsi que la stratégie appropriée et ajustent leur approche de marketing et leur processus commercial en fonction des seuls besoins de ce marché.
En outre, pour les Américains, un produit doit pouvoir être décrit en quelques phrases. Pour cela, il est important de savoir se concentrer sur ses points essentiels et d’aller droit au but.
Selon Jean Rauscher, directeur général de Yseop, après avoir travaillé aux États-Unis, certains commerciaux gardent cette approche lorsqu’ils reviennent en France. Une relation personnelle avec les clients reste privilégiée et de nombreuses réunions sont nécessaires. Mais les clients apprécient en prime l'efficacité des présentations.
Travail à distance
Lorsqu’une entreprise ouvre des bureaux aux États-Unis, les employés apprennent également à travailler avec des équipes distantes. Les Américains sont habitués au travail à distance, avec des collègues qu’ils n’ont jamais rencontrés. Ils se trouvent dans différents bureaux et communiquent par courrier électronique, Webex, téléconférence, etc. Il arrive même qu’ils travaillent ensemble pendant des années sans jamais s’être rencontrés. En revanche, en France, les réunions se font plutôt en personne. En général, lorsque des collègues travaillent ensemble, ils se retrouvent tous dans le même bureau.
Lorsqu’une entreprise a des équipes de chaque côté de l’Atlantique, il est moins aisé de se réunir en personne. Les Américains ayant l’habitude de travailler à distance, les Français sont alors encouragés à faire de même. En particulier, des employés ayant passé quelques années aux États-Unis avant de revenir en France seront plus enclins aux réunions à distance. Ils privilégieront le téléphone plutôt que de passer une heure dans la circulation pour se rendre à une réunion.
Utilisation de l’anglais
Lorsqu’une entreprise s’implante aux États-Unis, l’anglais devient plus important pour son fonctionnement interne. En effet, des informations essentielles, par exemple certains rapports ou la base de données des bogues, doivent être en anglais pour être comprises par l’équipe américaine.
Selon Jean Rauscher et Chris Hote, les entreprises pour lesquelles ils ont travaillé ont commencé à utiliser l’anglais pour ce type de contenu dès l’ouverture de leurs bureaux aux États-Unis. De plus, le fait que ces documents soient disponibles en anglais s’est révélé un atout décisif lors de leur acquisition par une société américaine.
Chez IDDI, tout a été écrit en anglais dès le début. Par exemple, tous les rapports, toutes les procédures standards (Standard Operating Procedures) sont en anglais, entre autres. Cela semble particulièrement important pour cette entreprise de recherche et de tests cliniques puisque les États-Unis sont à la pointe de ce secteur. En effet, plus de la moitié des revenus de cette société proviennent des États-Unis. Par conséquent, l’entreprise a tout intérêt à se conformer aux normes de la FDA, l'autorité américaine de réglementation des médicaments et des aliments.
Indépendamment de leur situation géographique, les entreprises changent au fil des ans. Mais lorsqu’elles s’implantent aux États-Unis, ces changements sont à prévoir.
Copyright © 2010 Ami Wright - Tous droits réservés.
(Cet article a d'abord été publié dans Le Courrier, le bulletin de la Chambre de Commerce Franco-Américaine de Nouvelle-Angleterre.)
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